L’Emir d’Ambroise-Paré : retour sur une polémique franco-française

Un riche Emir choisit la France pour ses soins, reconnaissant l’excellence chirurgicale et médical française. En apparence flatteur, cet épisode à donné lieu à de vives réactions.
Le cas n’est pourtant pas isolé. Régulièrement, des patients étrangers choisissent la France pour leur traitement. Ils seraient quelques milliers chaque année à se rendre dans l’hexagone pour bénéficier de soins de qualité, ce qui représente un gain financier non négligeable pour des établissements en mal de rentabilité (ça y est, le gros mot est lâché).
Si le phénomène n’est pas récent et bien connu des établissements comme l’Institut Gustave Roussy, l’Institut Curie ou d’autres établissements à la réputation mondiale, cela ne fait que quelques année que l’ose communiquer sur ce sujet sensible : l’accueil de patients étrangers en France. Et encore faut-il y être obligé. Ce fut récemment avec le cas avec notre Emir, lorsque M. Hirsch, Directeur de l’AP-HP fut sommé de s’expliquer sur cette entrée d’argent conséquente et bien inhabituelle pour des structures habituées aux déficits chroniques. Gagner de l’argent, mais vous n’y pensez pas, nous sommes un Service public !
“Renoncer à ces riches patients serait contre-productif” déclare en substance M. Hirsch.
Cette formulation fait référence à une notion de performance qui fait timidement son apparition sur quelques lèvres des décideurs depuis peu.
A l’heure où la recherche de solutions pour financer nos systèmes de santé et maintenir un niveau de services optimal pour la population paraît insoluble, aucune piste ne devrait pas être négligée.
L’Allemagne, l’Angleterre, la Belgique ou la Suisse ont depuis longtemps compris l’intérêt de se positionner sur le secteur de la mobilité médicale, plus loin de chez nous Dubai Health City est une illustration parlante d’un phénomène de fond amené à se développer ces prochaines années. La France, quant à elle, traîne les pieds et n’exploite pas son potentiel : il faut attendre fin 2012 pour qu’enfin, l’AP-HP prend la décision de revaloriser de 30% le coût des soins prodigués à tous les non-ressortissants. Elle leur appliquait jusqu’alors les tarifs nationaux de la sécurité sociale ! Une abbhération d’autant plus que jusque là, ces patients étrangers soignés aux frais du contribuable recevaient la facture de leurs soins… plusieurs mois après leur départ…
« Ils viennent par leurs propres moyens. Ils sont adressés par un médecin à des confrères français mais le système n’était pas organisé” déclarait alors Zohra Bensalem-Djenadi, en charge du tout nouveau département de l’AP-HP dédié aux patients internationaux. Mieux vaut tard que jamais…
La France dispose d’une expertise reconnue au niveau mondial, mais se prive de cette manne : doit-on refuser un traitement auquel un patient n’a pas accès dans son pays ou dont il souhaite bénéficier en France, au motif que ce patient est trop riche ?
L’argument récurrent qu’un service public n’est pas compatible avec la notion de rentabilité à ses limites : dans un contexte de « déshospitalisation » (orientation vers la médecine ambulatoire) et du baisse du nombre de lits d’hôpitaux, pourquoi ne pas affecter ces capacités aux patients étrangers, sachant que leur nombre oscillera entre 0,5 et 1% tout au plus? N’oublions pas non plus qu’il s’agit de soins programmés et que ces patients ne viennent pas prendre la place des français. C’est au contraire toute la population qui bénéficiera de la modernisation des infrastructures ou de nouveaux investissements en conséquence.
Il est grand temps de mettre en avant les atouts dont dispose notre pays, notamment son excellence en matière médicale et chirurgicale (offre de soins, accessibilité, rapport qualité-coût), qui offrent une opportunité unique de rayonnement international et de financement d’un système mal en point, pour lequel on se demande si la pratique de la médication traditionnelle est réellement efficace.
Le 11/06/2014